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Nouveaux réseaux, nouvelles possibilités : l’itinérance du privé vers le public

2023-10-13

Les réseaux mobiles 5G et LTE privés sont en plein essor. Avec l’émergence de divers cas d’usage, l’itinérance des réseaux privés vers les réseaux publics devient un enjeu crucial. Comment les telcos peuvent-ils répondre à ce nouveau besoin croissant ? Et quelles sont les approches possibles ?

Dans le domaine public, le nombre de réseaux 5G/LTE privés ne cesse d’augmenter. Selon l’outil de suivi des réseaux LTE/5G privés d’Analysys Mason, ils étaient au nombre de 448 au T1 2023, contre 338 un an auparavant, dont 50 % de réseaux 5G. Quels sont les facteurs de cette croissance rapide ? L’émergence permanente de nouveaux cas d’usage contribue largement à la croissance des réseaux privés. 

L’adoption accrue des technologies liées à l’Internet des objets (IoT) favorise également la création de réseaux privés dans les environnements manufacturiers et industriels. La demande de réseaux privés dans le secteur de la santé s'accroît en raison des dispositifs vitaux et médicaux critiques, des exigences en matière de sécurité et du taux d'occupation élevé. Les bureaux et les campus d’entreprise représentent également un marché potentiel, puisque le Wi-Fi n’y est pas toujours disponible. C’est aussi le cas des stades et des salles de concert, où la forte concentration d’usagers congestionne les réseaux cellulaires publics. 

Selon IDC, le marché de l’infrastructure LTE et 5G privée atteindra les 8,3 milliards de dollars d’ici 2026, porté par les entreprises qui constatent la valeur croissance de ce type de connectivité.

Avantages et inconvénients des réseaux privés 

Les réseaux privés offrent divers avantages aux organisations comme aux usagers. Le premier est la possibilité de personnaliser certaines fonctionnalités telles que la couverture, la sécurité, la fiabilité, la vitesse et les SLA en fonction de vos exigences. Ensuite, les réseaux privés sont capables de fournir une qualité de service (QoS) optimale puisque le trafic reste local. Cela fonctionne très bien pour les cas d’usage nécessitant une très faible latence. Les réseaux privés proposent également une bonne couverture locale ou intérieure, idéale pour les bureaux et les campus d’entreprise dans lesquels de nombreux utilisateurs finaux exécutent des tâches critiques.

Forrester a révélé que le secteur manufacturier était un grand consommateur de réseaux privés, étant donné que la 5G privée permet de déployer l’automatisation dans les ateliers et des applications de vidéo HD et de réalité augmentée/virtuelle (AR/VR). Elle est notamment utilisée pour les contrôles et la surveillance à distance, l’assurance qualité, la maintenance prédictive ou les solutions de sécurité des employés.

Les réseaux privés peuvent être configurés à l’échelle de l’entreprise ou du site, par exemple pour déployer un système de maintenance à distance ou des robots sur un site industriel.

Les réseaux privés ne sont toutefois pas dénués d’inconvénients. Selon les réglementations nationales du pays visé, vous devrez peut-être acquérir une licence pour du spectre dédié. Les réseaux privés 5G sont par ailleurs complexes et requièrent des compétences de gestion en interne, dont les entreprises manquent parfois. Ces dernières devront donc investir dans des programmes de formation ou opter pour l’externalisation. Les réseaux privés entraînent également une hausse des dépenses opérationnelles et d’investissement pour l’achat du spectre et de l’équipement, la mise en œuvre, les opérations et la maintenance.

Cependant, de nombreuses entreprises proposent des solutions de réseau privé sur le marché, notamment les telcos et fournisseurs d’équipements de télécommunication traditionnels, mais aussi de nouveaux acteurs plus modestes ayant développé leurs propres solutions.

La question de l’itinérance : des réseaux privés aux réseaux publics 

Les utilisateurs des réseaux privés, qu’il s’agisse de personnes ou d’objets, ont été définis, identifiés et configurés pour l’utilisation d’un réseau privé spécifique. Ainsi, ils ne sont pas définis comme des utilisateurs de réseaux publics par défaut. Pourtant, ces utilisateurs ou périphériques doivent parfois quitter le périmètre de leur réseau privé pour le réseau national, voire international. La notion d’itinérance entre alors en jeu.

Prenons l’exemple d’une compagnie aérienne ayant configuré un réseau privé dans son aéroport d’origine pour recueillir les données de ses avions en vue d’améliorer l’efficacité ou l’expérience passager. Cette compagnie souhaite bien évidemment continuer à recueillir des données là où ses avions voyagent, dans le monde entier. Elle doit pour cela mettre en place un mécanisme spécifique.

À l’heure actuelle, les utilisateurs de réseaux privés disposent de plusieurs méthodes d’itinérance entre les réseaux privés et publics, pour passer des appels ou envoyer des données via les réseaux publics. Les voici : 

1. Les utilisateurs/objets connectés du réseau privé disposent d’une autre identité sur le réseau public 

En pratique, cela signifie que le smartphone ou l’objet connecté est équipé d’une deuxième SIM ou d’une e-SIM dédiée au réseau public. Dans ce cas, l’utilisateur/le périphérique du réseau privé possède deux ’Mobile Country Codes’ (MCC) et ‘Mobile Network Codes’ de réseau mobile (MNC) et deux numéros de téléphone.

Cette approche comporte des avantages et des inconvénients. Elle est facile à mettre en œuvre, car le fournisseur de réseau public n’a pas à ouvrir son réseau à d’autres utilisateurs ou identités. L’opérateur du réseau privé n’a qu’une seule relation à gérer avec un fournisseur de réseau public. Le réseau privé bénéficie de tous les accords d’itinérance mis en place par le fournisseur du réseau public.

Du côté négatif, il est impossible de faire aboutir les SMS ou appels vers l’utilisateur ou l’objet. Cela vient du fait que l’emplacement du périphérique à un instant T est inconnu et par conséquent quelle identité utilisée, privée ou publique, est utilisée. L’appelant ne sait donc pas quel numéro appeler. Dans le cas de l’IoT, le trafic est majoritairement composé de données, ce qui facilite les choses. Seul un accès Internet est requis. 

De plus, l’utilisateur doit être enregistré dans deux bases de données Home Location Register/Home Subscriber Service/Unified Data Management (HLR/HSS/UDM), dans la base de données du réseau public et celle du réseau privé, ainsi que dans deux clés de chiffrement. L’exercice est donc complexe.

2. Une identité unique avec une identité internationale d’abonné mobile (IMSI)

Dans cette situation, le périphérique du réseau privé demande une nouvelle identité publique temporaire lorsqu’il se connecte au réseau public. Le réseau privé fonctionne comme un MVNO du réseau public. L’appareil connecté doit seulement disposer d’une SIM ou e-SIM avec deux IMSI, l’une pour le réseau privé et l’autre pour le réseau public.

Si le périphérique est en itinérance à l’échelle locale ou nationale et qu’il essaie de passer d’un réseau privé à un réseau public, un accord d’itinérance avec un ou plusieurs opérateurs publics nationaux suffit. Cependant, si l’itinérance se produit à l’échelle internationale et potentiellement dans plusieurs pays, la situation devient plus complexe. L’opérateur du réseau privé doit en effet négocier, configurer, tester et gérer tous les accords d’itinérance. 

Cette complexité signifie que l’opérateur du réseau privé a peut-être intérêt à externaliser une partie du processus à son partenaire du réseau public. Grâce à la solution Open Roaming Hub d’Orange Wholesale, l’opérateur du réseau public a accès à de nombreux partenaires d’itinérance dans un seul endroit, tout en conservant de la flexibilité pour négocier ses propres tarifs d’itinérance avec ceux qui l’intéressent.

Les opérateurs de réseaux privés disposent d’une autre option lorsqu’ils n’ont ni le temps ni les compétences internes pour assurer une telle gestion. Ils peuvent faire appel à des solutions telles que Roaming Sponsor d’Orange Wholesale, qui leur permet de bénéficier de tous les accords d’itinérance et des tarifs du partenaire sélectionné.

3. Utiliser le découpage 5G pour créer un VPN basé sur un réseau public 

Selon les analystes de TBR, « Le marché des réseaux privés 5G connaîtra une forte évolution à partir de 2025, avec l’établissement de normes 3GPP clés et l’élargissement de l’écosystème de périphériques. »

L’utilisation du ‘slicing’ (ou ‘découpage’) peut alors être envisagée. Les réseaux publics pourraient proposer des réseaux privés 5G aux clients via une « tranche » dédiée au réseau privé et à ses utilisateurs. Les clients pourront ainsi personnaliser les fonctionnalités, la sécurité ou la QoS, sans avoir à investir massivement dans une infrastructure privée dédiée. Malgré la probable nécessité d’un réseau radio privé, de nombreux autres composants réseau seraient proposés par le fournisseur du réseau public. Selon cette approche, le réseau privé utiliserait le MCC/MNC de l’opérateur public. 

Le principal avantage est que les utilisateurs du réseau privé peuvent automatiquement passer sur le réseau public, même en cas d’indisponibilité de leur réseau privé, par exemple lorsque l’utilisateur se trouve à l’extérieur du périmètre du réseau privé ou que la 5G SA n’est pas disponible.

Une technologie récente au fort potentiel 

Il n’existe pas encore de solutions miracles pour l’itinérance entre les réseaux privés et publics, mais leur nécessité commence à se faire ressentir. Pour le moment, tout dépend des besoins, du budget, des ressources et des compétences de l’opérateur du réseau privé en matière de configuration et de gestion de la solution. Les réglementations locales peuvent également limiter les possibilités. En fonction des besoins, plusieurs solutions peuvent être combinées pour assurer l’itinérance entre les réseaux privés et publics. 

Dans un contexte de croissance rapide des réseaux privés, ce n’est qu’une question de temps avant que ce type d’itinérance devienne un enjeu urgent.